jeudi 25 novembre 2010

Un nouveau pacte éducatif pour plus d’égalité


Dans le combat pour le progrès social, le système éducatif ne peut pas tout ; mais il reste déterminant pour agir à la racine des inégalités. Ce n’est donc pas un hasard si le projet éducatif du PS occupe une place majeure dans le texte sur « l’égalité réelle » qui sera soumis au vote des adhérents socialistes le 2 décembre, avant sa ratification en convention nationale le 11 décembre.

Pourquoi proposer à la Nation un nouveau pacte éducatif ? Il y a d’abord urgence à inverser la logique de démantèlement que la droite fait subir à l’école publique, par la mise en concurrence des établissements, par leur étranglement financier et par la remise en cause de la formation des enseignants. Les socialistes devront surtout transformer une école républicaine restée très élitiste, où la reproduction sociale marche à plein et qui creuse les écarts de niveau scolaire. Alors que la France est appelée à relever son niveau de qualification pour assurer son avenir, le taux de bacheliers au sein d’une génération stagne autour de 60-65% depuis une quinzaine d’années, on assiste même depuis peu à un recul de la scolarisation des jeunes de 18 ans. Une nouvelle politique de démocratisation scolaire s’impose !

Nos réformes s’appuieront sur une augmentation substantielle de la dépense éducative, alors qu'elle est passée de 7,6% à 6,6% du PIB entre 1995 et 2008. L’effort devra porter notamment aux deux bouts de la chaîne éducative. D’un côté, la création d’un véritable service public de la petite enfance et l’instauration de la scolarité obligatoire dès 3 ans sont primordiales pour lutter contre les inégalités à la racine. De l’autre côté, l’alignement des conditions d’études à l’université sur celles des classes préparatoires apparaît indispensable pour lutter contre l’échec massif en 1er cycle et contre la reproduction sociale des élites.

Mais pour réussir, nos réformes devront aussi repenser le temps de la scolarité obligatoire. Ainsi les rythme éducatifs doivent être adaptés, à tous les niveaux, aux rythmes propres des enfants : nous rallongerons l’année scolaire et nous organiserons la semaine de cinq jours, assurant aux élèves des journées mieux équilibrées. L’accompagnement du travail personnel sera inclus dans le temps éducatif, au sein de l’école, au moins jusqu’en 5e. L’acquisition d’une culture commune par l’ensemble des élèves supposera aussi d’ouvrir une large concertation, avec les citoyens et les personnels, sur les finalités de l’Ecole, dont le fonctionnement actuel repose encore trop sur la sélection par l’échec. Le débat devra porter sur les contenus, comme sur les méthodes d’apprentissage et d’évaluation.

Les socialistes ne pourront se contenter de reprendre le « socle commun de connaissances et de compétences » : sa mise en œuvre par la Droite a conduit à une inflation de référentiels dont les contenus et les modalités de validation sont aujourd’hui critiqués par beaucoup d’enseignants. Nous devrons affirmer une vision de gauche, plus ambitieuse, sur les savoirs et les compétences attendus d’une éducation républicaine. Cette culture commune, pour être acquise par tous, impliquera d’en finir avec le redoublement – cher et scolairement inefficace – au profit d’une pédagogie individualisée, mais inscrite dans le cadre privilégié de la classe, s’appuyant sur le travail d’équipe, sur la rénovation des disciplines et sur la remise à plat des modes d’évaluation. Ces transformations permettront notamment d’assurer enfin le succès du collège unique.

L’écart entre les établissements de centre ville et ceux des quartiers populaires ne cesse de se creuser. Or loin de ne bénéficier qu’aux plus faibles, l’hétérogénéité fait progresser l’ensemble des performances scolaires. Ainsi la ségrégation à l’œuvre dans l’Ecole française est tant injuste qu’inefficace. Nous devrons donc renouveler et renforcer la carte scolaire en ajoutant aux critères géographiques un indice de mixité sociale, auquel l’enseignement privé sera également soumis. Et il faudra donner réellement plus de moyens à l’éducation prioritaire, de façon à augmenter les taux d’encadrement, mais aussi à créer des options attractives et valorisantes.

Les enseignants seront au cœur du pacte que nous voulons construire entre la Nation et son école. Sollicités pour mettre en œuvre les nécessaires transformations du système éducatif, ils devront voir leur métier revalorisé, y compris leurs salaires. Ravagée par la droite, leur formation professionnelle devra être rebâtie, avec un recrutement en fin de 4e année universitaire (master 1), puis une année de stage rémunérée (5e année, master 2) suivie d’une année de formation continuée avec un service réduit. Afin de garantir une plus grande mixité sociale dans le recrutement des enseignants, nous mettrons aussi en place un système de pré-recrutement.

Ne donne-t-on pas une place excessive à l’école, au détriment de l’égalité sociale ? C’est la question troublante que posent François Dubet, Marie Duru-Bellat et Antoine Vérétout dans Les sociétés et leur école (Seuil, 2010). En comparant entre eux une trentaine de pays, les auteurs constatent qu’une forte emprise du diplôme sur le destin social contribue paradoxalement à accroître les inégalités scolaires et la reproduction sociale. Quand un pays comme la France considère que le diplôme doit déterminer strictement la position sociale, la lutte pour son obtention pèse lourdement sur le système scolaire, au détriment de sa dimension éducative et culturelle. Bref, trop d’école tue d’école ! Au-delà de sa thèse polémique sur « l’inflation scolaire », ce livre est une invitation salutaire à bâtir une école moins utilitariste, tout en cherchant à diversifier les voies de l’égalité réelle.

Lien vers le texte de la convention "égalité réelle"


mardi 12 octobre 2010

Immigration de travail : une histoire qui n'en finit pas de s'écrire


Alors que les feux de l'actualité sont braqués sur les retraites, c'est un autre conflit du travail qui vient se rappeler à notre mémoire. Habitants, élus et militants du 12e sont à vrai dire sensibilisés de longue date à la grève des travailleurs sans papiers. Nous étions déjà présents en 2008 au côté des salariés du Barrio Latino, et à nouveau en 2009-2010 avec les grévistes qui occupaient l'agence Randstad de l'avenue Daumesnil - brutalement évacuée en mars dernier. Depuis jeudi dernier, afin que l'Etat tienne enfin ses engagements de juin 2010, ce sont plusieurs centaines de travailleurs sans papiers qui, avec la CGT, occupent pacifiquement la Cité Nationale de l'Histoire de l'Immigration.

Le lieu est symbolique ! Autrefois musée des colonies, le palais de la Porte Dorée est désormais lieu de mémoire d'une France riche des nombreux apports économiques et culturels de son immigration. Mais à rebours de l'histoire, le gouvernement actuel préfère pratiquer la stigmatisation des étrangers tout en s'attaquant aux droits des travailleurs. En l'occurrence, les travailleurs sans-papiers de la Porte Dorée, non seulement n'ont pas d'autorisation de séjour et de travail, mais n'ont pas non plus accès aux droits que leur ouvrent en principe les cotisations sociales qu'ils paient depuis des années à des employeurs souvent sans scrupule. Droit à l'assurance maladie, droit à la retraite notamment...

C'est avec l'ensemble de la majorité municipale que nous avons voté hier soir ce voeu :

"Considérant que depuis jeudi 7 octobre, plusieurs centaines de travailleurs sans-papiers occupent la Cité Nationale de l’Histoire de l’Immigration (CNHI), dans le 12e arrondissement,

Considérant que cette occupation s’inscrit dans le prolongement de la grève entamée depuis de longs mois par des milliers de travailleurs sans-papiers pour obtenir leur régularisation,

Considérant que plusieurs dizaines d'entre eux habitent ou travaillent dans le 12e arrondissement, et que notre conseil d'arrondissement leur avait apporté son soutien dès 2008 et à nouveau en 2009,

Considérant qu'en juin dernier, les travailleurs sans-papiers et les onze organisations qui les soutiennent obtenaient une avancée importante et significative du Ministère de l’Immigration et de la Direction générale du Travail par le biais :
  • d'un addendum au Guide des Bonnes Pratiques de novembre 2009, qui insistait sur la nécessité de délivrer aux demandeurs une autorisation provisoire de séjour de 3 mois (renouvelable) avec autorisation de travailler, lors du dépôt de leur dossier, et rappelait que les régularisations devaient se faire selon des critères objectifs et uniformes par l'ensemble des Préfectures.
  • d'une reconnaissance du droit des 6804 grévistes recensés de séjourner et de travailler en France dans l'attente du dépôt de leur dossier jusqu'au 30 septembre dernier.

Considérant que ce délai du 30 septembre passé, sur les 1806 premiers dossiers de demande déposés, seuls 58 salariés ont obtenu une autorisation provisoire de séjour et de travail, et que se poursuivent les arrestations de grévistes au mépris des engagements de juin dernier.

Considérant que l’Etat a une nouvelle fois failli à ses engagements devant des hommes et des femmes qui vivent et travaillent en France depuis de nombreuses années et qui, pour beaucoup d'entre eux, participent à la solidarité nationale par leurs cotisations sociales et leurs impôts, laissant les intéressés dans l'incertitude et la précarité,

Considérant qu'avec l'occupation de la CNHI, les travailleurs sans papiers nous rappellent qu'au-delà du respect de leurs droits, leur combat s'inscrit pleinement dans l'histoire de notre pays, un pays riche des nombreux apports économiques et culturels de son immigration,

Considérant que le projet de loi "immigration, nationalité et intégration" présenté actuellement à l'Assemblée nationale par le Ministre de l'immigration ne dit pas un mot des critères de régularisation des travailleurs sans papiers, préférant s'en tenir à un accord sans valeur législative contraignante,


Sur proposition de la majorité municipale, le Conseil du 12ème arrondissement :
  • affirme son soutien aux travailleurs sans papiers qui occupent actuellement la CNHI pour faire valoir leurs droits
  • émet le vœu que le Maire de Paris intervienne auprès du Premier Ministre pour exiger la mise en œuvre sans délai des engagements pris en juin dernier afin de régulariser la situation de tous les travailleurs sans papiers qui en font la demande."

Photo : Mathieu Delmestre

jeudi 23 septembre 2010

"contre-réforme" et (petite) révolution


À nouveau ce 23 septembre, la mobilisation populaire est venue frapper aux portes du gouvernement pour lui manifester combien il s’est coupé du peuple ! Or déjà ce matin, l’Elysée tentait de minimiser l’événement. Quant à François Fillon, il déclarait mardi : « Nous avons suffisamment combattu ensemble l’extrême droite pour demander aux responsables socialistes de ne pas se compromettre avec une extrême gauche qui conteste nos institutions démocratiques et dont le programme économique est archaïque ». Outre l’amalgame grossier entre l’extrême droite et les diverses composantes de la gauche présentes à Vieux-Boucau dimanche dernier autour du porte-parole du PS Benoît Hamon, cette tirade traduisait déjà la crainte d’un gouvernement qui pour remettre en cause un progrès social fondamental, le droit à la retraite à 60 ans, a fait le choix de la confrontation avec les forces sociales et parié sur la résignation des Français.

Le conditionnement médiatique nous avait pourtant bien préparé à accepter cette "contre-réforme". « Repousser l’âge de départ à la retraite est une nécessité largement admise. Sauf à entretenir un mensonge général sur la capacité de l’Etat à financer le système, il faut bien regarder les réalités en face », pouvait-on par exemple lire le 9 septembre dernier dans l’éditorial du pourtant progressiste Le Monde… Et Benoît Hamon, dans une tribune percutante, de déconstruire ces prétendues réalités, en montrant notamment que le salarié français est tout sauf un privilégié en Europe en matière de retraites. Comme le rappelait hier un article de Liêm Hoang Ngoc, les propositions du PS esquissent ce que pourrait être une réforme juste et progressiste, qui taxe les revenus du capital et des banques, s’attaque aux nombreuses niches sociales et fiscales injustifiées, tout en menant une politique économique alternative, qui relève la part des salaires dans la valeur ajoutée et donne priorité à l’emploi.

Profitons du temps libre, partageons les richesses ! L’enjeu n’est pas nouveau. Depuis deux siècles, l’espérance de vie augmente. Depuis un siècle, grâce aux luttes sociales et politiques, le temps de travail diminue (durée hebdomadaire, congés payés, pensions de retraites). Et pendant ce temps la richesse nationale n’a cessé d’augmenter ! Ces trente dernières années, la part de cette richesse attribuée aux salaires a néanmoins perdu 10 points au profit du capital. Cette question est au cœur de l’appel initié par Attac et la fondation Copernic, qui a débouché sur plusieurs meetings unitaires et de nombreux comités locaux. Le comité unitaire du 12e rassemble ainsi des organisations syndicales, politiques (du PS au NPA) et des associations autour du mot d’ordre repris sur son tract : « pour le maintien de la retraite à 60 ans, partageons les richesses ! ».

Le rassemblement de la gauche dans la mobilisation sociale devra trouver un débouché politique. C’est l'une des leçons que je retiens de la belle réunion publique organisée hier soir par le comité du 12e. Au-delà des divergences réelles, sur la durée de cotisation par exemple, nous avons mis en avant une analyse partagée des enjeux de cette "contre-réforme" et notre conviction que l’unité d’action est aujourd’hui la seule réponse possible à la politique destructrice et incendiaire de la droite. Comme je l’ai dit hier soir, il n’est pas question d’enjamber la mobilisation sociale actuelle et de dire que l’avenir des retraites se jouera en 2012 : notre énergie doit être tout entière, au Parlement et dans la rue, contre le projet du gouvernement. Néanmoins, à moyen terme, il est indispensable que cette unité dans la mobilisation sociale trouve un débouché politique. C’est tout le sens des interventions de Jean-Vincent Placé (Les Verts) et de Pierre Laurent (PCF) au Vieux-Boucau dimanche dernier. Tous deux ont affiché leur volonté de trouver d’ici l’été 2011 un accord politique qui rassemble la gauche, un « pacte d’union populaire » (P. Laurent) qui esquisse pour 2012 non une simple alternance mais une véritable alternative.

Un gouvernement de transformation sociale supposera non seulement une gauche rassemblée mais un PS qui change sa culture de gouvernement. A cet égard, Benoît Hamon rappelait dimanche combien la mobilisation sociale avait été cruciale pour la mise en œuvre par le gouvernement de Front populaire de la « petite révolution » de 1936, comme l’appelait Léon Blum. Mais sans attendre la petite révolution de 2012, il s’agit dès maintenant de poursuivre et d’amplifier la mobilisation sociale contre le projet de réforme des retraites !


mardi 14 septembre 2010

Enseigner, comme si de rien n’était


Ce n’était pas arrivé depuis quarante ans ! Dans les collèges et les lycées, la rentrée des élèves fut marquée cette année par deux journées consécutives de grève. Elles mobilisèrent très largement des personnels remontés contre un gouvernement qui non content de dégrader chaque année un peu plus les conditions de travail de l’école publique, bazarde la formation professionnelle des enseignants et reporte l’âge de départ à la retraite des salariés ! J’enchaînai trois manifestations en quatre jours, la première dès le samedi quatre septembre – jour anniversaire de la proclamation de la IIIe République – pour répondre à l’appel citoyen lancé cet été suite aux mesures inégalitaires et xénophobes annoncées par le Gouvernement sur la déchéance de la nationalité et au sujet des Roms. Sur le chemin du retour au collège, perplexe, je méditai cette phrase de Salim Abdelmadjid lue dans la presse : « L’inacceptable se sédimente, imperceptiblement d’abord, jusqu’à atteindre un seuil, qui n’apparaît peut-être jamais que rétrospectivement, au-delà duquel il déborde. […] Résister, ce ne peut pas être seulement intervenir au moment du débordement, ce ne peut-être que résister continuellement à la sédimentation de l’inacceptable » (texte complet à lire sur lemonde.fr).


Je débutai mes cours de Troisième avec les Tziganes : un vrai cas d’école ! Rien de tel dans l’actualité récente pour mesurer combien l’histoire, la géographie et l’éducation civique aident à la compréhension du monde d’aujourd’hui. Quelles institutions ont décidé le démantèlement des camps de Roms et les expulsions vers la Roumanie ou la Bulgarie ? Ces mesures sont-elles légales au regard de la Constitution française (dernier rebondissement hier dans la presse) et au regard des normes européennes ? Quelles différences entre les Roms arrivés d’Europe de l’Est depuis la chute du Mur de Berlin, les Roms au sens de l’U.E., les Gitans français de Saint-Aignan ou ceux que mes élèves côtoient dans leur quartier ? De quel crime contre l’humanité les Tziganes européens ont-ils été victimes pendant la Seconde Guerre mondiale ? Quelles discriminations subissent-ils encore aujourd’hui ? Quels progrès représente pour eux l’élargissement de l’U.E. ? Bref, j’enseignai, comme si de rien n’était…


Nota Bene : l'image en tête de cet article est la couverture du livre d'Henriette Asséo, Les Tsiganes, Une destinée européenne, Découvertes Gallimard, 1994


lundi 17 mai 2010

Convention du PS pour un nouveau modèle de développement : l'espoir à gauche


Il y a 18 mois au congrès de Reims, les socialistes donnaient le spectacle de leurs divisions, renouant ainsi avec le mal qui les ronge depuis leur défaite du 21 avril 2002. En pleine crise financière mondiale, ils s’empêtraient encore dans les faux débats entre partisans et adversaires de l’économie de marché, entre "internationalistes" et "protectionnistes", entre "modernes" et "archaïques", entre aubrystes, ségoléniste et hamonistes, s’interrogeant même sur l’opportunité d’une stratégie d’alliance avec le Modem de François Bayrou.

A lire le nouveau projet économique, social et écologique que les adhérents socialistes s’apprêtent à approuver jeudi prochain, le temps des divisions et du louvoiement semble révolu. Le texte qui sera proposé au vote des militants a en effet été adopté à l’unanimité du Conseil national du PS. Quelques personnalités réservées vis-à-vis de cette orientation, telles que Gérard Collomb, Manuel Valls ou François Rebsamen, ont déposé une contribution sans oser la mettre au vote. Sur le fond, le texte soumis au vote marque une rupture salutaire avec l’ambiguïté et la logique d’accompagnement du système actuel qui ont trop souvent caractérisé les positions du PS.

Les socialistes partent d’une analyse sans concession de la faillite du capitalisme financier "qui a laissé s’accumuler, depuis une trentaine d’années, de profonds déséquilibres économiques, sociaux, humains et écologiques". Reconnaissant au passage les limites de la gauche de gouvernement qui "n’a pas suffisamment engagé le changement profond de modèle de société qui était nécessaire", les socialistes promeuvent la régulation et l’intervention publiques dans la sphère économique pour redonner priorité aux objectifs à long terme que sont la justice sociale et le bien-être, l’éducation et la culture, la sobriété énergétique et la préservation de la biodiversité.

Le PS appelle à "un nouveau contrat social européen" et mondial. Alors qu’actuellement elle dérégule les marchés, met en concurrence les Etats et leur impose des politiques de rigueur désastreuses, il est impératif que l’UE intègre enfin les objectifs de croissance, d’emploi et de convergence sociale, et qu’elle se dote d’un gouvernement économique, avec un budget fédéral appuyé sur un impôt européen et sur une capacité d’emprunt propre. Les directives de libéralisation doivent être renégociées. Et pour substituer au libre-échange le "juste échange", l’UE doit utiliser des tarifs extérieurs communs spécifiques pour les filières menacées et créer à ses frontières des "contributions sociales et environnementales". L’UE doit militer pour replacer le commerce au service des pays les plus pauvres et pour que les normes internationales sociales, sanitaires, culturelles et environnementales acquièrent une valeur juridique qui les rende opposables au principe du libre commerce dans le cadre de l’OMC.

A contrario des poncifs néo-libéraux présentés comme les remèdes à l’actuelle crise européenne, les socialistes sont favorables à "des politiques budgétaires contracycliques". L’Etat doit pouvoir financer les politiques de relance nécessaires pour contrer les récessions et revenir à l’équilibre budgétaire en période de croissance, ce qui suppose notamment la mobilisation de nouvelles ressources par une fiscalité plus juste et mieux répartie. Il est ainsi à craindre que la réduction drastique de la dépense publique, notamment imposée à la Grèce par le FMI et les institutions européennes, n’aboutisse qu’à amplifier la récession !

En France, la puissance publique doit être le moteur d’un nouveau modèle de production, orienté vers une croissance saine, sélective et durable. L’Etat doit se doter d’outils de planification, d’un pôle public d’investissement industriel et d’un pôle public financier. Il doit pouvoir recourir aux nationalisations et développer les services publics. Les investissements publics tout comme la fiscalité des entreprises comporteront des critères sociaux et environnementaux.

Face à la crise sociale, l’emploi et les salaires appellent des mesures fortes, incluant une assurance chômage étendue, un droit du travail plus protecteur, la réhabilitation des 35 heures ou encore la mise sous tutelle des entreprises florissantes qui licencient. Le rééquilibrage au profit des salariés du partage de la valeur ajoutée et des gains de productivité passe par une hausse du SMIC, par une conférence salariale annuelle, par une fiscalité incitative ou encore par une échelle des salaires de 1 à 20 dans les entreprises avec participation publique. De nouvelles ressources doivent être trouvées pour pérenniser le financement la protection sociale, notamment pour préserver la retraite à 60 ans et renforcer les moyens de l’hôpital public. Enfin, une ambitieuse politique du logement passe par la reconquête des logements vacants, la construction massive de logements sociaux et le recours si nécessaire au blocage des loyers et à la régulation des prix du foncier et de l’immobilier.

Soumis jeudi au vote des adhérents et ratifié en convention nationale le 29 mai prochain, le texte engagera alors tous les socialistes, y compris notre futur(e) candidat aux élections présidentielles. Ce travail sera prolongé par trois autres conventions nationales d’ici la fin de l’année : sur la rénovation politique, sur les questions internationales et sur l’égalité réelle.

Avec ce nouveau modèle de développement, le PS confirme son ancrage au gauche et ouvre avec succès le chantier de son réarmement idéologique et programmatique. Il écarte les faux débats sur "les contraintes de la réalité", ou encore sur la "société du soin" – thème abordé en fait par Martine Aubry à propos des personnes âgées et dépendantes. Rétrospectivement, cette convention donne tort à Jean-Luc Mélenchon et à ses proches – je pense notamment à mon ami du 12e Alexis Corbière –, des camarades de longue date qui désespérés, claquaient la porte du Parti en plein Congrès de Reims, voyant dans les résultats du vote militant la défaite d’une pensée socialiste à la hauteur des défis présents.

Parce qu’il représente une base de discussion crédible pour un programme commun de toute la gauche, ce texte est surtout un point de départ. Il est désormais de notre responsabilité, à nous socialistes, de créer les conditions du rassemblement, car il n’y aura pas de victoire en 2012 pour une véritable transformation sociale, sans unité de la gauche.



dimanche 11 avril 2010

Zoo du Bois de Vincennes : de lourdes incertitudes sur le projet de rénovation porté par l’Etat et Bouygues


Article co-écrit avec Catherine Baratti-Elbaz et publié sur www.ps-paris12.net

En pleine campagne des élections régionales, les ministres candidates Valérie Pécresse et Chantal Jouanno annonçaient l’ouverture en 2014 d’un zoo entièrement rénové dans le Bois de Vincennes. Nombreux sont les médias à avoir relayé la signature en grande pompe du partenariat public-privé (PPP) devant permettre la création de ce « zoo du XXIe siècle tourné vers l'écologie et la biodiversité, l'un des plus beaux au monde ! » Nombreux sont les habitants du 12e – et nous en sommes – à envisager cette perspective avec enthousiasme, après avoir connu les années de déclin de cette institution puis sa fermeture en 2008.

Enthousiasme, mais scepticisme aussi… Car de multiples interrogations persistent, sur lesquelles il est temps de revenir, passée la période électorale. L’enjeu est de taille, que l’on songe à l’attachement des Franciliens à ce parc qui a permis à des générations d’enfants la découverte d’une faune spectaculaire ; que l’on mesure aussi l’impact du zoo sur son environnement proche ; que l’on relie enfin ce projet aux enjeux écologiques en cette année 2010 déclarée par l’UNESCO « année internationale de la biodiversité ».

Or c’est d’abord de l’équilibre financier du projet dont il est permis de douter et donc de la pérennité de ce projet. Sur 133 millions d'euros de rénovation, l'Etat doit subventionner le projet à hauteur de 30 millions d'euros. Le reste est financé à travers un contrat de PPP entre le Muséum National d'Histoire Naturelle, dont dépend le zoo, et le groupe Chrysalis mené par Bouygues Construction. Chrysalis qui s'engage à financer, construire et entretenir ce zoo pendant 25 ans et qui recevra, en contrepartie, une redevance annuelle de 12 millions d’euros de la part du Museum, soit le triple de ce que le groupe Chrysalis aura investi ! C’est bien le principal travers du système de PPP dont l’intérêt à court terme – l’afflux de capital privé n’alourdissant pas officiellement la dette publique – est contrebalancé par le coût exorbitant, à long terme, pour la puissance publique.

Officiellement, le niveau de fréquentation du zoo qui permettrait au Muséum de s’acquitter d’un tel loyer est de 1,4 millions de visiteurs par an, dès la première année ! C'est un objectif très ambitieux, qui s'il n'est pas atteint, mettra certainement le Museum en grande difficulté, d’autant que cet établissement scientifique tourné vers la recherche et la diffusion des connaissances, a d’autres missions de service public à assumer. Souhaitons que cette épée de Damoclès n’oblige pas le zoo à développer outre mesure les activités lucratives et festives au détriment de ses missions de service public. D’autant plus que le ticket d’entrée est annoncé à plus de 13 euros ! A ce prix, les franciliens pourraient être davantage tentés par d’autres activités du Bois à l’accès gratuit ou modique (Parc Floral, Ferme pédagogique, aquarium de la Porte Dorée…).

Conçu comme un lieu de protection et de recherche sur la biodiversité, le projet de zoo est indigent quant à son insertion dans son environnement immédiat. Le zoo est pourtant situé dans le Bois de Vincennes, dans le 12e arrondissement de Paris. La Ville s’est dotée d’un Plan Climat extrêmement ambitieux et le Bois fait désormais l’objet d’une charte d’aménagement durable dont les communes riveraines telles que Vincennes sont parties prenantes. Or le contrat de PPP ignore les conséquences en terme de déplacements et de stationnement de la fréquentation prévue du nouveau zoo. Malgré l’arrivée prochaine du tramway, financé à 100% par les collectivités locales de gauche, et faute d’investissement de l’Etat dans les transports collectifs franciliens, la desserte du zoo par les transports collectifs risque de s’avérer insuffisante. Le Bois subira une pression supplémentaire de l’automobile dans un contexte déjà tendu. Pression insupportable pour le bien-être des riverains ; insupportable au regard de la protection de la biodiversité du Bois ; insupportable enfin vis-à-vis des objectifs de réduction par la métropole parisienne de ses émissions de gaz à effet de serre.

Espérons que ce projet de zoo connaîtra un meilleur sort que les candidatures régionales de ses promoteurs Mesdames Pécresse et Jouano et Monsieur Lafon. Ce dernier, Maire de Vincennes et tête de liste UMP dans le 94, a été battu au second tour dans sa propre commune, trois semaines après s’être félicité sans réserve de la signature du PPP avec Chrysalis.

dimanche 4 avril 2010

Biodiversité : échec à Doha, agir à Paris

Si 2010 est l'année internationale de la biodiversité, c'est qu'il y a urgence : la moitié des espèces vivantes que nous connaissons sur Terre pourrait disparaître d’ici un siècle, avec des conséquences graves quant à l'équilibre des écosystèmes et à la fourniture de biens irremplaçables et indispensables à notre survie tels que nourriture, oxygène, matières premières. Hélas, trois mois après l’échec retentissant de la conférence de Copenhague, c’est à Doha qu’à nouveau la communauté internationale a échoué à s'entendre : ni le thon rouge de l’Atlantique, ni l’ours polaire, ni les coraux, ni les requins ne verront leur commerce interdit ou règlementé. En France, le Grenelle de l'Environnement vient de prendre du plomb dans l'aile avec le renoncement du Président de la République à créer un embryon de fiscalité écologique. L’examen à l’Assemblée nationale du projet de loi Grenelle 2 sera un test, notamment sur les trames vertes et bleues nécessaires à la promotion de la biodiversité.

Mais dans la bataille politique pour l’écologie, les collectivités locales ont aussi leur rôle à jouer. Rien qu'à Paris vivent plus de 2000 espèces de plantes sauvages et de champignons, et autant d'espèces animales ! Notre agglomération, très dense, est surtout un carrefour biogéographique où la préservation de corridors écologiques est un enjeu fondamental, d’ores et déjà pris en compte dans le PLU parisien et par l’adhésion de la Ville à Natureparif. Par ailleurs, Paris met en oeuvre une gestion différenciée de ses espaces verts, parmi lesquels nombreux sont ceux labellisés en gestion écologique.

Avec Michèle Blumenthal, nous avons souhaité que les deux semaines qui viennent soient consacrées à la promotion de la biodiversité dans le 12e. Des opérations concrètes seront lancées telles que l'inauguration d'un pigeonnier square Saint-Eloi et l'installation d'une végétalisation expérimentale place "sans nom" (angle des boulevards Reuilly/ Picpus). De multiples actions artistiques et pédagogiques ("Y'a du monde au lac", le Carnaval des écoles...) nous feront découvrir et mieux comprendre la biodiversité en Ville.

Cette quinzaine permettra en outre le lancement dans le 12e du plan parisien pour la préservation et le renforcement de la biodiversité. Ce plan fait l'objet d'une démarche participative incluant des ateliers citoyens autour d'un secteur pilote dans notre arrondissement. Il aboutira à la rédaction d'un livre blanc et au vote d'une délibération en Conseil de Paris. La présentation de ce plan aura lieu le mardi 13 avril à 19h00 à la Mairie du 12e en présence de Fabienne Giboudeaux, adjointe au Maire de Paris chargée des espaces verts. Ce sera aussi l'occasion de recruter des habitants volontaires pour participer à cette démarche.

Pour plus d’information :
- ma communication au dernier conseil d’arrondissement
- le programme complet de la quinzaine sur le site de la Mairie du 12e
- le dossier biodiversité sur le site de la Ville de Paris

samedi 3 avril 2010

Appel à la mobilisation citoyenne !

La répression de la grève des travailleurs sans papiers se poursuit. Jeudi, les forces de l’ordre ont évacué le piquet de grève de la rue du Regard (Paris 6e), et celui de l’avenue Daumesnil dans le 12e, où les grévistes campaient sur le trottoir après avoir été expulsés du local Randstad une semaine auparavant.

Je ne reviendrai pas sur le contexte politique (voir mon article précédent). L’heure est plus que jamais à la mobilisation. A cet égard, je regrette vivement que mon parti, le PS, n’ait pas signé l’Appel unitaire à la mobilisation citoyenne autour duquel les organisations de gauche se sont réunies jeudi. Je rejoins complètement Pascal Cherki à ce sujet.

Le comité de soutien du 12e a décliné localement l’appel à la mobilisation citoyenne. Le parti socialiste du 12e est signataire de ce "manifeste" dont voici le texte (il est consultable aussi sur le site du collectif) :

Manifeste pour une mobilisation citoyenne

Depuis 18 mois, les travailleurs sans-papiers du XIIe sont en grève. Ils ont occupé l’agence Randstat au 30, avenue Daumesnil jusqu’à leur évacuation par les forces del’ordre le 24 mars. Ils ont alors décidé de maintenir le piquet devant l’agence sur le trottoir. Le 1er avril, 7 cars de CRS sont venus, sur ordre de la préfecture, démonter la tente et déloger les grévistes. C’est une nouvelle atteinte violente aux droits des travailleurs. Ce même jour, les forces de l’ordre ont également évacué le piquet FAB SAB de la rue du Regard.

Après avoir été désavoué dans les urnes, et au lendemain de la présentation par M. Eric Besson en Conseil des Ministres de son nouveau texte sur l’immigration, le gouvernement a décidé d’employer la manière forte et de déclencher une offensive généralisée contre le mouvement de grève des travailleurs sans-papiers.

Nous, comité de soutien du XIIe regroupant associations, syndicats, partis politiques et simples citoyens appelons tous les habitants et travailleurs du XIIe à signer avec nous ce manifeste et à appeler à une mobilisation citoyenne pour :

- CONDAMNER CES ÉVACUATIONS qui constituent une atteinte au droit de grève de ces travailleurs
-RÉAFFIRMER NOTRE SOUTIEN À LA GRÈVE DES SALARIÉS SANS-PAPIERS qui travaillent en France depuis de nombreuses années, cotisent, paient des impôts et font le travail dont personne ne veut
- EXIGER LEUR RÉGULARISATION IMMÉDIATE
- INSTAURER UNE PROTECTION CITOYENNE AUTOUR DES GRÉVISTES
- PARTICIPER À LA SOLIDARITÉ active et financière
- Marquer notre volonté d’organiser, en accord avec les grévistes et les 11 organisations syndicales et associatives qui coordonnent le mouvement, des initiatives fortes de mobilisations et de solidarité pour obtenir une circulaire définissant des critères larges, ouverts et objectifs de régularisation des salariés sans-papiers.


Comité de soutien aux travailleurs sans-papiers grévistes du 12e : SUD PTT 12e, SUD Rail 12e, UL-CGT12e, ATTAC 12e, Ligue des Droits de l’Homme 12e, Commune Libre d’Aligre, Collectif de Vigilance Paris 12e pour les droits des étrangers/RESF, CNT-nettoyage, PS 12e, PC 12e, Les Verts 12e, Gauche Alternative 12e, NPA 12e, PG 12e et les citoyens solidaires.

jeudi 25 mars 2010

Agence Randstad évacuée : des lendemains d'élections qui déchantent

Hier matin, mercredi 24 mars, la préfecture de police a brutalement évacué les travailleurs "sans papiers" en grève qui occupaient depuis 18 mois l'agence d'interim Randstad du 30 avenue Daumesnil.

Moins de trois jours après sa cuisante défaite électorale, la droite gouvernementale confirme sur le terrain la leçon qu'elle semble tirer de ce scrutin : à droite toute ! Et l'adversaire, ce sont d'abord les salariés. Les salariés sans papiers, dont le gouvernement refuse de reconnaître le droit au séjour faisant régner l'arbitraire dans les préfectures, alors qu'ils travaillent ici, cotisent à la Sécu et se font exploiter par des entreprises souvent peu scrupuleuses. L'adversaire, ce sont aussi les centaines de milliers de salariés qui ont défilé mardi dernier pour défendre leur pouvoir d'achat, leurs retraites, leurs emplois.

L'adversaire, c'est en même temps l'étranger, bouc-émissaire des difficultés sociales, cible depuis 2007 du ministère de l'identité nationale. Sarkozy pensait avoir définitivement récupéré l'électorat frontiste... Las ! Le FN se refait une santé aux régionales, et voilà la droite gouvernementale prise à nouveau au piège de l'inévitable surenchère nationaliste et xénophobe.

Evacués deux jours après la fin de la trêve hivernale, sans revenus (grévistes depuis 18 mois !!!), nos camarades sont depuis hier dans la rue, désespérés, avec toutes leurs affaires, sur le trottoir devant l'agence du 30 avenue Daumesnil. Les appels se multiplient (voir ci-dessous), auprès de Randstad pour qu'ils rouvrent l'agence, et surtout auprès de la préfecture pour qu'ils soient régularisés. Les élus ainsi que le comité de soutien du 12e se mobilisent. Et la CGT bien-sûr, qui mène depuis 2008 un travail de titan, trop méconnu, pour faire avancer la cause des travailleurs sans papiers.

L'urgence est aujourd'hui que le Gouvernement reçoive les onze organisations de soutien et qu'une discussion s'ouvre enfin pour établir rapidement - comme le réclament y compris certaines organisations patronales (CGPME...) - des conditions simples, objectives et transparentes de régularisation des travailleurs sans papiers, avec une égalité de traitement sur l'ensemble du territoire national.

à consulter :
Communiqué du comité de soutien du 12e
Communiqué des élus du 12e

samedi 23 janvier 2010

Téléphonie mobile : besoin de service public

C’est une petite bombe dans le monde des télécoms qu’a lancé Bertrand Delanoë à l’occasion de ses voeux pour 2010 ! La Ville de Paris souhaite déployer un réseau mutualisé de micros antennes relais qui pourrait se substituer progressivement aux antennes actuelles. Installé sur le mobilier urbain, ce réseau de téléphonie mobile permettrait à terme une forte réduction de la puissance d’émission des antennes, tout comme des téléphones, sans dégradation de service. Ainsi la Ville de Paris montre à l’Etat la voie à suivre pour concilier le besoin de meilleures performances technologiques – les téléphones multimédias ont décuplé les usages – et l’inquiétude croissante sur les effets sanitaires des ondes, validée par le dernier rapport de l’Affset sur les radiofréquences d’octobre 2009 qui invite les pouvoirs publics à poursuivre les recherches et dans l’attente, à envisager la réduction des niveaux d’exposition de la population.

Paris avait déjà été pionnière en signant en 2003 une charte de bonne conduite avec les trois opérateurs, incluant un processus de concertation ainsi – fait unique en France – qu’un seuil maximum d’exposition de la population fixé à 2 V/m en moyenne sur 24 heures, soit bien en dessous des seuils réglementaires. Mais ces dernières années, y compris dans la Capitale, les conflits se sont multipliés entre des opérateurs peu scrupuleux, confrontés à la saturation de leurs réseaux, et des riverains – soutenus par des associations nationales très mobilisées – criant au scandale sanitaire et réclamant l’application d’un seuil d’exposition de 0,6 V/m en pic – une valeur arbitraire retenue par certains chercheurs en 1999 comme un compromis possible entre technologies hertziennes et protection sanitaire.

Or l’Etat tarde à prendre ses responsabilités. Il aura fallu que la justice ordonne en 2008 les premiers démontages d’antennes pour que le Gouvernement finisse par organiser au printemps dernier un « Grenelle des Ondes » aboutissant à des conclusions ministérielles bien décevantes, hormis l’expérimentation menée actuellement dans plusieurs villes françaises de l’abaissement des niveaux d’expositions aux ondes (à Paris dans les 14e et 15e arrondissements). En matière de téléphonie mobile, 2009 aura surtout été marquée par l’attribution d’une 4e licence d’opérateur à Iliad (Free), l’Etat espérant ainsi aboutir à une baisse des tarifs hexagonaux régulièrement classés parmi les plus élevés d’Europe – à croire que la libre concurrence ne fonctionne pas toujours au profit du consommateur ! Quand les Français attendaient le lancement d’études sanitaires, le déploiement encadré des antennes relais et la révision des seuils d’exposition aux ondes selon le principe de précaution, le gouvernement a jugé plus urgent d’autoriser, pour 240 millions d’euros, le déploiement d’un réseau supplémentaire de téléphonie mobile.

Pour concilier service universel, performances technologiques et protection de la santé, il conviendrait aujourd’hui de faire entrer la téléphonie mobile dans le champ du service public de télécommunications – limité par la loi de juillet 1996 à la téléphonie fixe – sous la forme d’un unique réseau public, partagé entre les différents opérateurs. Cette logique de service public appliquée aux réseaux de télécommunications devrait aussi accompagner le déploiement de la fibre optique. On sait aujourd’hui que pour déployer le « très haut débit », il suffirait à France Télécom de remplacer les parties terminales de son réseau actuel, encore en cuivre, par de la fibre optique. Or là encore, soucieux avant tout de garantir la « libre concurrence », l’Etat a cherché à mettre d’accord les divers opérateurs privés pour qu’ils acceptent de partager les investissements et les infrastructures, ce qui devrait aboutir à un patchwork de réseaux... dans les seules zones denses (environ 5 millions de foyers) ! Pour déployer la fibre optique dans le reste de la France, l’Etat vient d’annoncer qu’il investira près de deux milliards d’euros au titre du grand emprunt. Mais il n’est même pas sûr que cet investissement public suffise à convaincre les opérateurs de prendre un risque financier dans des zones qu’ils jugent non rentables.